Patricia Menetrey

Un Voie de Réalisation

Rencontre avec Richard Moss Le 20 février 2014 à Paris

(in les archives de MéditationFrance)

Faire grandir sa conscience

De passage à Paris le 20 février 2014, cet enseignant spirituel et auteur de plusieurs livres dont « Le papillon noir » aux éditions Le souffle d’or nous invite à un changement radical.

Patricia Menetrey, collaboratrice de Méditationfrance, a rencontré et interviewé Richard Moss :

Patricia Menetrey : Pouvez vous définir l’état de conscience dans lequel vous vous trouvez actuellement?

Richard Moss : Dans cet état domine la gratitude, comme expérience majeure dans les relations. En même temps, je suis bien conscient des problèmes que traverse l’humanité : l’environnement, les dégradations, les conflits et la souffrance créée par notre ignorance, notre volonté perverse.

Gratitude parce que je peux donner à travers mon expérience une parole qui atteint et encourage des êtres à créer leur propre expérience, et ainsi se poser des questions plus profondes.

Il existe aussi certains moments comme des orages, du mauvais temps. Alors je demeure tranquille et laisse mon mental faire ce qu’il veut faire. Parfois, je suis concerné par mon fils, parfois par un engagement plus profond avec ce que je nomme l’ombre. Juste une opportunité de demeurer assis silencieusement jusqu’à ce que le soleil revienne.

P.M. : Qu’appelez vous l’ombre ? Serait-ce l’ego ?

R.M. : Pour moi l’ego est un véhicule pour ma vie et mon travail. En ce qui concerne l’ombre, il n’est pas facile de faire la part de ce qui est personnel et collectif.

Je parle à des milliers de personnes et je les invite à regarder en eux, où se trouvent leurs rigidités inconscientes et collectives. Par exemple la prédominance d’une psychologie patriarcale dans notre monde et qui s’exprime de différentes manières dans différentes sociétés. Je tente de travailler sur moi–même à propos de cette conscience patriarcale, mais il est important d’y travailler également sur un plan collectif. L’ombre n’est pas seulement personnelle. Elle est aussi collective.

Fondamentalement, j’ai besoin de travailler d’abord avec et sur ma parole. Mais l’ombre est à la fois personnelle et collective. Pour mon ombre personnelle, j’ai déjà beaucoup travaillé avec elle, il n’en reste plus grand chose. En ce qui concerne l’ombre collective, je ne pense pas que quiconque aboutisse à une forme de conscience totale. Nous allons aussi loin que nous le pouvons, mais les limites sont réelles. Nous ne pouvons pas aller beaucoup plus loin que l’inconscient collectif.

Si vous voulez gravir le sommet d’une pyramide, il va falloir vraiment s’occuper de la base. Si vous voulez promouvoir, faire accélérer la conscience, chacun doit pouvoir avancer. Je ne pourrais pas avancer moi-même sans être concerné par la progression d’autrui.

P.M. : Votre partage est donc une invitation pour chacun d’entre nous à devenir plus conscient. Offrez-vous une technique pour atteindre ce but ?

R.M. : La technique principale est ce que je nomme le mandala de l’être. Elle offre essentiellement de vivre le moment présent à travers une pure conscience.

Dans le moment présent, une qualité de cette conscience demeure. Dans mon expérience, les perceptions sont vivifiées. Le mental devient vaste comme un océan. Cette immensité du silence existe en tout. Doux et calme courant intérieur où les sons, les odeurs, les pensées, les sensations, tous les objets de la conscience sont amplifiés.

P.M. : Comment observer l’objet de la conscience ?

R.M. : Il existe quatre catégories : l’objet du passé et nos croyances à son sujet, l’objet du futur et nos croyances à son sujet, l’objet de notre identification à nous-mêmes (c’est à dire, les croyances et les jugements sur nous même) et, enfin, l’objet de nos jugements et croyances sur autrui. Observez toutes vos identifications à ces formes de pensées.

Mon enseignement principal est qu’il n’existe que le moment présent.

Vous avez un passé ! N’y soyez pas identifié. Vous êtes concerné par le futur ! Ne soyez attaché à aller nulle part. Observez les jugements et toutes ces histoires que vous vous créez sur vous-même, sur les autres, et laissez les s’en aller. Soyez simplement ICI dans votre corps.

Pour moi la conscience n’est pas séparée de ce corps. Le corps est dans le ici. Si vous vous éveillez, vous vous éveillerez dans ce corps et prendrez part à un corps plus large.

Toute méthodologie efficace confère l’idée d’un corps plus alerte. L’idée c’est d’être en contact avec un Soi plus authentique, avec « soi-même » sans être influencé par les pensées d’un mental spécieux et trompeur.

Tant de pratiques proposent un Soi authentique : inventez-les ! 

Respirer, tourner, danser, jeûner, choisir d’être silencieux… La grâce est toujours présente dans un état d’éveil.

Mais n’attendez pas la grâce; choisissez et investissez-vous profondément dans ce que vous choisissez d’être. Toutes les pratiques de méditation sont un support à cet objectif. L’éveil apparaît comme la plus grande capacité à être intime avec soi-même, les autres et la vie.

La méditation est essentiellement une auto observation. Si vous êtes conscient d’une chose, vous pourrez être amené à la transcender : petite et grande chose, quel que soit votre niveau de conscience. La plus grande conscience aboutit à être véritablement en lien. Ici est le petit soi, ici est le soi illimité et vous ne les séparez plus. Ici est l’ego, ici est cette conscience qui le transcende.

La conscience qui transcende ne doit jamais punir le petit soi opprimé. Et l’ego ne devrait jamais réprimer ou ignorer la conscience illimitée.

P.M. : Vous avez mentionné qu’il faut toujours exprimer la meilleure partie de soi. Pourquoi est-ce aussi difficile ? Pourquoi choisissons-nous d’être misérables ?

R.M. : Je dis que chacun d’entre nous dans cette pièce est déjà un maître.

Nous sommes les maîtres de l’identification avec nos pensées et nos croyances. Nous nous protégeons d’un monde supposé menaçant. Nous sommes nés dans un monde plein de croyances. Dociles ou rebelles, nous les acceptons ou les rejetons ; ce qui est exactement la même chose.

La raison de cette difficulté provient de nos très anciennes habitudes. Nous sommes tellement habitués à vivre avec nos peurs au lieu de les considérer d’une manière plus saine. Notre aptitude à apprendre de nos peurs et de nos supposées menaces est très limitée.

Nous nous défendons de la peur en recherchant le pouvoir. : dans la relation, où nous tentons de contrôler nos conjoints ; dans le business où nous imaginons contrôler l’argent. Des milliers d’heures d’existence où nous avons cru à de fausses histoires nous concernant, concernant autrui, concernant le passé, le futur. Et si peu de talent pour gérer ce que nous estimons être menaçant.

Le changement n’est pas difficile. Il est lent. Une fois que vous entamez ce processus de l’éveil de la conscience, alors le changement se met en place. Une nouvelle relation s’installe, vous n’êtes plus possédé par vos pensées.

Ce changement semble lent, mais une fois le processus entamé, vous allez bousculer les murs de cette prison. L’éveil est pour tous. Et ce qui est bon pour moi peut être bon pour chacun.

Nous voulons tous nous sentir heureux. Nous avons peur d’être malheureux. Alors qu’il suffit d’observer et ressentir ses sensations aller et venir. Ce qui compte c’est l’investissement dans ce processus, en devenir l’observateur. Tout le reste passe, comme le temps qu’il fait.

Aujourd’hui, le soleil est présent ; demain, il pleut. Ce n’est ni bien ni mal. C’est juste ainsi.